Les rhumatismes
Le mot rhumatisme (du grec : rheuma, fluxion) évoque l’idée d’une fluxion passagère. Il désigne une affection fugace se traduisant par une douleur vive. En Chine, le rhumatisme (fong-che) est associé à la triple notion de fugacité (Jong), de froid (han) et d’humidité (che). Le patient redoute le « froid nocif» en milieu humide. Les rhumatis· mes se caractérisent par la fluxion, la douleur et des manifestations articulaires. L’évolution de la maladie est marquée par des complications cardiaques, pleuropulmonaires et cérébrales. La médecine tra .. ditionnelle chinoise a toujours eu pour but de lutter contre le gonflement des jointures; la douleur apparaît dans les articulations. Dans le Compendium général de la matière médicale (Pen-ts’ao kang-mou, 1590), les fameux « os de tigre» (os fossilisés) permettaient de combattre la fluxion avec les « cornes de cerf>> associés à l’ Angélique (Tang-kouei). Li Che-tchen (1518-1593) avait déjà sélectionné plus de vingt remèdes antirhumatismaux dont nous préciserons les principaux constituants.
La nosologie occidentale distingue le rhumatisme articulaire aigu (maladie de Bouillaud), les arthrites et les rhumatismes infectieux, la polyarthrite chronique évolutive, la spondylarthrite ankylosante, les arthroses, les rhumatismes abarticulaires et les algies rachidiennes. La goutte constitue un chapitre spécial avec poussées inflammatoires pseudo-phlegmoneuses et tophus (dépôts d’urates).
D’après F. Coste (1958), « ce qui définit avec le plus de précision le rhumatisme, c’est d’abord le fait qu’il s’attaque au système locomoteur : jointures, muscles, tendons, aponévroses, tissu cellulaire – tous dérivés du feuillet mésodermique de l’embryon; c’est ensuite l’existence de lésions très particulières, différentes de celles qu’engendrent les infections et les tumeurs, ou d’autres facteurs d’agression tissulaire -; mais ces lésions elles-mêmes ne sont pas d’un type uniforme, elles changent selon la variété de rhumatisme considérée; (;’e.si. enfin l’ignorance où ron demeure, aujourd;hm encore, des causes de ces maladies et du mécanisme biologique qui aboutit à de tels désordres tissulaires ».
Le rhumatisme n’est pas une maladie mais un groupement d’affections. L’histoire des formes d’origine inflammatoire ne peut être séparée de celle des formes d’origine dégénérative qui aboutissent à l’enraidissement du rachis.
Le traitement des rhumatismes, bien qu’il se soit considérablement enrichi au cours des dernières années avec l’apport des médicaments occidentaux, du type anti-inflammatoire Phénylbutazone, est resté très traditionnel dans les campagnes chinoises .
Les médecins traditionalistes chinois distinguent la prescription d’une plante spécifique qui peut être accompagnée d’un certain nombre de drogues. Il existe des interréactions dangereuses entre les médicaments, qui ont été bien étiquetées et critiquées par Henri Pradal : « Les douleurs rhumatismales réagissent particulièrement bien au G/ifanan, dans les arthroses, les arthrites, les périarthrites, les lombosciatiques, les névralgies. Les rhumatismes, une fois installés, durent toute la vie, et il est très souhaitable que les malades, pour traiter des crises douloureuses à répétition, utilisent un médicament comme le G!ifanan qui est un des moins toxiques, surtout en cures prolongées ou réitérées »’. ,,
En Chine, le médicament anti-inflammatoire et antidouleur qui s’appuie sur les plus vieilles cures est le Smilax. On a donc le choix entre le traitement simple avec la plante spécifique ou le traitement combiné avec ou sans drogues occidentales.
Le traitement simple. Le Smilax ou T’ozl Fou-ling (Fou-ling de la Terre) est le remède spécifique du rhumatisme articulaire aigu. Il s’agit de la fameuse racine de Chine, plante des régions montagneuses de la Chine méridionale (Smilax glabra Roxb.). Elle est récoltée à l’automne, réduite en tranches et séchée au soleil. Elle était employée à Canton (1972) en décoction et recommandée contre le rhumatisme cardiaque.
Le traitement combiné. L’Asie orientale continue à croire à la triple cause du rhumatisme (fugacité, froid et humidité). L’Union du Sud (Nan-lien) de T’aï-wan prescrit toujours les « pilules destinées à chasser le vent (la fugacité) et à pénétrer dans les os (les articulations)» (Tchouei:fong t’eou-kou wan, 1975).
Les Chinois traditionalistes considèrent cinq affections : 1. leji-oid nocif (han) associé à l’humidité (che) pénètre dans les vaisseaux ou méridiens (king-/o) : les articulations exposées au froid sont les premières frappées; 2. les douleurs vives des quatre membres (les genoux, le cou de pied, les épaules, les poignets); 3. la marche difficile (la douleur s’accroît avec le mouvement); 4. la douleur localisée dans la région lombaire et dans la cuisse; 5. les manifestations articulaires (inflammation des articulations).
Le traitement combiné envisage principalement la suppression des phénomènes douloureux. Il comporte l’emploi des ingrédients suivants: Wou-t’eou (Aconitum L.), anesthésique et tonique; Tch’e siao-teou (Se men Phaseoli), tonique et carminatif; Hiangj’ou ( Cyperus rotundus), stomachique; Kiang-houa (Rhizoma Notopterygii), antirhumatismal; Tch’ouan-kong (Rhizoma ligustici) contre les ver·· tiges et les céphalées; Tch’e-yao (Radix Paeoniae), sédatif, dépuratif et stomachique; Ma-houang (Herba Ephedrae), contre les fièvres et les douleurs articulaires; Si-sin (Radix A sari) antirhumatismal; T’ien nan-sing (Rhizoma Arisaematis) contre les fluxions, etc.
La vitesse de sédimentation augmente avec la poussée fébrile. Nous avons attiré l’attention, dans L’hôpital à Paris (1973), sur les « pilules destinées à activer la circulation sanguine» (Ta ho la tan). Ce médicament, très employé en Chine populaire, comprend :
Chaque pilule, enrobée de miel, est prise matin et soir, dans de l’alcool de riz chaud ou de l’eau bouillie. Ce remède freine les spasmes, stimule la circulation sanguine et arrête l’engourdissement. Il permet de lutter contre les douleurs articulaires. Il traite les crampes en général. Ce médicament est distribué à Pékin sous la marque de Li Che-tchen.
Les thérapeutiques traditionnelles chinoises sont encore peu explorée en Occident. Les drogues chinoises les plus prescrites contre le rhumatisme sont : Stephania tetandra, Siler divaricatum, Angelica sylvestris, Angelica grosserrata, Justicia gendarussa, Conioselinum univittatum, Clematis chinensis, Cinnamomum cassia, Aconitum fischeri et Aconitum autumnale.
Les informations contenus dans cet article ne doivent pas être utilisés comme outil de diagnostic ni être substitués à un diagnostic médical ou à un traitement médical. Il est conseillé au lecteur de toujours consulter un médecin, ou un autre professionnel de la santé compétent avant d’envisager tout traitement.