Définition du transfert
Le transfert peut se définir comme le report sur le thérapeute de sentiments qui ont été éprouvés dans le passé par le patient. Sentiments qui sont d’autant plus forts qu’ils ont été éprouvés pour la première avec des personnages significatifs de notre vie, ceux qui nous l’ont donnée et avec lesquels nous avons fait nos premières expériences, c’est-à-dire nos parents.
La force du transfert, sa répétition viennent précisément de la force de ces premières expériences vécues.
Le transfert en hypnose
Il faut différencier le transfert d’avec l’amour. En hypnothérapie il est certain que nos patients nous aiment (pas d’amour, comme le souligne très justement Durand de Boussingen, mais parce que nous sommes essentiellement des personnages rassurants).
Dans l’hypnose, du fait du transfert et de la régression, nous revenons à une situation où le sujet était petit et sous la dépendance de son père et de sa mère, ce qui implique la répétition et la régression. L’hypnose se caractérise par une situation de répétition des conduites d’une part, et également, comme nous l’avons vu, de régression ; c’est-à-dire que le sujet, dans le contrat, abandonne ses mécanismes de défense conscients ; il aboutit à des conduites plus anciennes régressives et régressivan tes du nourrisson vis-à-vis de sa mère et s’abandonne complètement.
On obtient donc un état de dépendance très important où se manifeste une absence de volonté et où le sujet s’identifie à l’image de l’autre.
Ce qui fait que l’on décrit deux types d’hypnose :
L’une maternelle, basée sur des relations transférentielles d’amour l’autre paternelle, qui est basée sur des réactions de crainte. Il y a également, de la part du sujet, une réceptivité de votre personnage qui est dans un style paternel ou dans un style maternel. D’où l’importance, sur le plan de la technique, d’une certaine souplesse qui vous permettra de vous adapter au sujet.
L’hypnose implique donc deux choses : d’une part une régression, d’autre part une position imaginaire de transfert profond, c’est-à-dire un jeu de rôles, une répétition de conduites antérieures, le sujet n’acceptant cette situation du fait de la régression qu’à condition qu’elle soit comprise dans un contrat précis entre le thérapeute et lui. Les réactions de nos malades ne nous concernent pas, elles concernent leurs expériences anté rieures ; la situation est déplacée et, quand le patient a un transfert positif, c’est-à-dire quand il déplace des situations antérieures sur nous, nous sommes tout prêts à admettre que ce n’est pas du transfert mais de l’amour, et, ce faisant, très rapidement nous risquons non plus de jouer un personnage, comme le dit très justement Durand de Boussingen, mais de nous laisser jouer par le personnage qu’on nous donne, et nous devenons le grand médecin, le grand dentiste, l’être le plus intelligent, etc.
Pour le malade, comme l’a souligné Lacan, le médecin est celui qui est censé savoir et pouvoir.
Ce savoir et ce pouvoir sont d’ailleurs partiellement vrais, mais il est certain que le malade leur ajoute beaucoup d’éléments subjectifs ce qui fait que, comme l’a écrit Cahen, « ce que le malade attribue au médecin est, pour une part, réel et existant ; pour une part, « fantasmique » et que beaucoup de masses affectives inconscientes, momentanément actives, par conséquent « en mal de projection », s’engouffrent dans le canal de la relation ».
Quand le transfert est négatif, le sujet nous manifeste des sentiments violents et hostiles et, là encore, nous risquons de nous laisser prendre au jeu en lui expliquant que nous sommes pleins de bonnes intentions à son égard alors qu’il nous parle de lui, de son passé, qu’il projette sur nous des événements datant de quinze, vingt ans et parfois plus. Le danger est précisément alors « d’entrer dans la situation », ce qui va nous amener à des heurts et à des disputes, à un véritable dialogue de sourds.
Nous devons donc toujours avoir présent à l’esprit que Je sujet vient chez nous avec des problèmes antérieurs et que ce sont ceux-ci qu’il transfère, qu’il projette sur nous et que, par conséquent, son affection, son admiration (ou son hostilité et sa hargne) ne correspondent nullement à des sentiments actuels. De toute manière, au fur et à mesure que la « relation » s’établit, nous rentrons progressivement, nolens volens, dans l’imaginaire du patient avec notre propre imaginaire, notre propre passé, notre propre histoire, et nous arrivons alors à établir un contre-transfert, et c’est celui-ci que le thérapeute doit savoir manier avec beaucoup de doigté, de subtilité, au cours du traitement, ce qui nécessite beaucoup d’intuition, d’expérience, et ne saurait s’apprendre dans les livres.