Comment faire votre propre malheur par temps de pandémie ?


Avez-vous remarqué que, lorsque l’on va mal, il est très souvent compliqué de trouver le chemin pour aller mieux ?

Soit par aveuglement : on est tellement mal que l’on ne voit plus de solution, soit parce qu’il est impossible d’appliquer toutes les injonctions qui nous sont faites pour aller mieux.

Faire de la méditation ou du yoga chaque matin, par exemple, c’est formidable quand tout va bien mais quand on est déprimé, c’est une entreprise absolument gigantesque et probablement vouée à l’échec.

Pareil pour tous les autres conseils, du style : s’occuper de soi, voir des amis ou ne serait-ce que sortir de chez soi. De plus, aujourd’hui, le coronavirus ne nous aide pas et sabote bien des initiatives salvatrices.
Alors pour une fois, je vous propose de réaliser la démarche inverse : au lieu de chercher des idées simples pour aller mieux, je vous invite à dresser la liste de toutes ces actions qui construisent à coup sûr votre mal-être si vous les suivez à la lettre. Et par exemple :

– Surtout ne pas lâcher ni votre téléphone, ni aucun autre écran de toute la journée et garder votre smartphone sous votre oreiller la nuit (on ne sait jamais)

– Programmer sur votre téléphone le plus possible de notifications sur le COVID à travers le monde ;

– Regarder le journal-télé matin, midi et soir (plus, au choix, une chaîne télé ou radio d’information continue à consulter dans la journée en cas de manque) ;

– Mettre consciencieusement et constamment vos enfants en garde sur les risques du virus (bénéfice supplémentaire : vous ne serez pas le.la seul.e angoissé.e)

– Interdire à qui que ce soit toute approche type câlin, bisou et embrassade en tout genre ;

– S’interdire également évidemment de toucher qui que ce soit ;

– Passer toute sa maison à l’eau de javel ou au désinfectant selon les surfaces ;

– Ne plus sortir de chez soi que pour les obligations absolues ;

– Ne plus aller chez le médecin ni chez aucun professionnel médical (trop dangereux pour la santé) ;

– Télétravailler sans discontinuer, en grignotant à son clavier le midi et jusqu’à épuisement le soir ;

– Afficher votre fiche de paie largement amputée en raison du chômage partiel dont vous faites l’objet ;

– Dans votre lit, avant de dormir (en admettant que cela puisse se produire), tout en respirant bien à fond et rapidement, interrogez-vous sur ce qui pourrait vous arriver demain :


o Attraper le COVID et en développer une forme grave
o Qu’un de vos proches et tendres attrape aussi le COVID, peut-être même par votre faute
o Perdre votre emploi à cause du COVID (Pour les entrepreneurs, perdre ses clients/revenus à cause du COVID et pour ceux qui ont déjà perdu leur job, envisager de ne plus jamais en retrouver)
o Vous faire vacciner et faire une réaction allergique rare et aigüe

Si avec ces beaux conseils, vous ne vous sentez pas suffisamment mal, amusez-vous à trouver de nouvelles idées déprimantes 😉.

Je suis certaine que vous pouvez faire aussi bien que moi !

… Sinon, pour être heureux, vous pouvez aussi faire tout le contraire … Alors, que choisissez-vous ?

Bien entendu, cet article ne vous dispense absolument pas d’appliquer les gestes barrières ni de rencontrer un professionnel de la relation d’aide ou votre médecin traitant.

Nadine LINDREC-PORS,
Praticienne en hypnose et thérapies brèves à Rennes.
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*Clin d’œil à Paul WATZTLAWICK Faites vous-même votre malheur Ed. Seuil
Paul WATZLAWICK est un philosophe psychanalyste puis théoricien de la communication du 20e siècle (1921-2007). C’est l’un des pères de l’« école de Palo Alto ». Il a écrit de nombreux ouvrages scientifiques (Une logique de la communication, Changement, Le langage du changement, …) mais aussi des livres humoristiques à destination du plus grand nombre comme Faites vous-même votre malheur ou Comment réussir à échouer. Il a largement contribué au développement des « thérapies brèves » en psychothérapie.
Paul WATZLAWICK avec entre autres Gregory BATESON, Jay HALEY, et Don JACKSON, va asseoir l’« École de Palo Alto » comme une référence en matière de psychothérapie et particulièrement en ce qui concerne la thérapie familiale. En s’intéressant au symptôme et à sa résolution plutôt qu’à son origine, il apporte un point de vue nouveau sur le patient qui devient acteur de sa thérapie. Son approche constructiviste relie communication, structure familiale et problèmes psychologiques.