Qu’est ce que la sophrologie ?

C’est le professeur Alphonso Caycedo, psychiatre de répu­tation internationale, d’origine espagnole, né en Colombie et rési­dant à Barcelone, qui a été le fondateur de l’Ecole sophrologique, en 1960.

Une confusion très regrettable règne encore chez beaucoup de médecins qui pensent qu’hypnose et sophrologie sont synonymes. Rien n’est plus inexact. L’hypnose est en effet une technique plus ou moins rituelle, permettant d’obtenir, du fait du changement d’état de conscience du patient, d’impor­tantes modifications touchant toutes les fonctions de l’orga­nisme.

La sophrologie est au contraire tout à la fois une science, une philosophie, une thérapeutique et un art. Son but essentiel est l’étude phénoménologique de l’ensemble des moyens psy­chologiques, physiologiques, chimiques, physiques, capables d’agir sur la conscience humaine et de la modifier, ainsi que celle de leur application en thérapeutique médicale.

La sophrologie: une science

Comme l’ont souligné très justement les éminents sophrolo­gues suisses Abrezol et Dumont, élèves personnels du Dr Cay­cedo, la sophrologie est née au sein de la médecine psychoso­matique et en est partie intégrante. Son champ d’étude est extrêmement vaste puisqu’il englobe la totalité des phénomènes capables de provoquer des modifications de la conscience hu­maine. Parmi ceux-ci se trouvent les techniques de relaxation autogène et hétérogène, les systèmes orientaux d’entraînement, comme le yoga et le zen, qui sont des méthodes d’intégration psychophysique très remarquables se pratiquant depuis des millé­naires en Orient. En plus de la psychopharmacologie moderne, elle étudie également les états de consciences obtenus par le moyen de systèmes plus ou moins primitifs chez certains peuples et certaines sectes.

Le professeur Caycedo, qui a vécu aux Indes pendant deux ans ainsi qu’au Japon, a étudié les modifications des états de conscience chez les grands yogis des Himalayas et chez les maîtres du zen japonais. De cette longue étude est née la méthode de relaxation dynamique que nous étudierons dans un prochain chapitre et qui, à notre avis, constitue une arme thérapeutique d’une valeur exceptionnelle.

La sophrologie s’occupe également des phénomènes très impro­prement appelés « hypnotiques », par Braid, au siècle dernier. Comme la psychanalyse et beaucoup de techniques psychothéra­piques occidentales, elle tire ses origines de l’étude des phéno­mènes improprement appelés hypnotiques.

Sophrologie est un terme créé par Caycedo pour désigner « non seulement les phénomènes appelés hypnotiques mais les techniques de relaxa­ tion, l’hypnose active fractionnée de Kretschmer, l’entraînement autogène de Schultz, les techniques de Jacobson, Chertock … ainsi que tous les états voisins tels que ceux rencontrés au cours du yoga : les transes médiumniques, les extases natu­relles … où il existe, selon nous, un profond dénominateur com­mun phénoménologique ».

Caycedo fait dériver sophrologie du sophrosynen platonique : « état de calme, et concentration suprême de l’esprit, produit par de belles paroles ».

Etymologiquement, nous l’avons vu, sôs est une racine grecque qui signifie harmonie, équilibre ; phren, esprit, et logos, étude, traité. Cependant, plus que l’esprit en état d’équilibre, la sophrologie a pour but d’étudier les modifi­cations et phénomènes de la conscience humaine obtenus au moyen de procédés psychologiques, physiques et chimiques.

Au 5eme congrès international de Psychothérapie médicale de Vienne, en aoüt 1961, dans une communication intitulée :

« Vers une phénoménologie de l’hypnose clinique, des techniques de relaxation et états voisins », Caycedo affirma :

« Nous promulguons l’abolition du mot  » hypnose  » de la terminologie médicale, non seulement parce que nous le considérons impropre pour ces phénomènes mais parce que le même mot est, en soi, por­teur d’une série considérable de réactions émotionnelles, contradictoires, qui rendent difficiles non seulement la thérapeutique, mais aussi la méthode et la forme d’action du médecin, qui se voit obligé de lutter contre la dose de mystère et de magie que cette dénomination entraîne par elle-même. Nous avons adopté le nom de sophrologie au lieu d’hypnose, et d’états sophroniques au lieu d’états hypnotiques, les considérant plus fidèles à la réalité et plus significatifs. »

Ces deux citations permettent de situer très exactement l’Ecole sophrologique.

Pourquoi cette rupture avec l’hypnose classique ? Pour plu­sieurs raisons. Tout d’abord, comme l’écrivait Caycedo :  « Le fait réel est que les frontières décrites et classées par les hypnoti­seurs classiques ne résistaient pas à une étude phénoménologi­que et s’écroulaient comme des châteaux de cartes.

Le  » pays des merveilles  » construit par la fantaisie et monté sur un mythe historique laissait à découvert le secteur le plus important du psychisme : la  » conscience « . Les sophrologues découvrirent progressivement que tout le rituel de l’induction était inutile et que la classification des phénomènes décrits se révélait inexacte. Les descriptions d’innombrables techniques remplissent de nom­breux traités.

Tous ces procédés, dont certains semblent assez extraordinaires, utilisent en réalité le même principe d.e base consistant à détourner l’attention du sujet puis, une fois le résul­tat obtenu, à lui donner des suggestions très simples, très faci­lement acceptables. La classification de certains phénomènes décrits s’avérant inexacte, l’interprétation de bon nombre de faits se révélant en contradiction avec l’expérimentation, il fallait pro­céder à une révision des valeurs. Face à cette situation critique, affirme Caycedo, nous avions trois possibilités. La première : abandonner la pratique des phénomènes comme cela s’est passé chez bon nombre de médecins ; la seconde : tenter une révision de l’intérieur, nous perdant dans des luttes dialectiques, pour la plupart stériles ; la troisième : rompre définitivement avec la tradition et chercher un nouvel angle pour l’étude des modifications de la conscience. Nous avons opté pour cette troisième solution. Il fallait partir de zéro et recommencer ; trouver une nouvelle terminologie ainsi qu’une nouvelle méthode de recherche scientifique, capable d’unifier une série de procédés qui, malgré des noms différents, possèdent, selon nous, un commun dénomi­nateur : les modifications de l’état de conscience. »

Caycedo souligna alors l’importance d’une nouvelle Ecole qui, sous les auspices d’un néologisme qu’il proposa : la sophrologie, pour étudier la conscience humaine au moyen de la méthode phé­noménologique.

L’histoire de la sophrologie comprend essentiellement trois périodes.

  • La période de fondation en 1960. Elle est marquée par la rupture avec la tradition pour les raisons déjà énoncées. Comme l’a souligné Caycedo, l’Ecole sophrologique n’a pas été créée dans un dessein de controverse dialectique. Elle n’a pas la prétention de détenir à elle seule la vérité, ni, à plus forte raison, d’être la seule à pouvoir aborder les phénomènes qu’elle étudie. Si elle s’intéresse à l’étude des procédés qui influent sur la conscience humaine, elle n’entend nullement se les approprier pour autant en les rebaptisant et annexant leur histoire, ce qu’a très justement souligné Alfredo Issasi. Elle tire son originalité de la formation de ses membres qui, du fait de leur étude et de leur pratique de la relaxation dynamique, ont une formation mixte, à la fois orientale et occidentale. L’entraînement du sophrologue se situe essentiellement sur le plan de l’expérimen­tation directe. La période de fondation et de démarrage de l’Ecole sophrologique s’est achevée au congrès de Versailles du 30 septembre 1968.
  • La période de structuration. Elle va du congrès de Ver­sailles au congrès mondial de Sophrologie, octobre 1970. Elle est caractérisée par la mise en place des structures de base, du corps enseignant et des équipes de recherche.
  • La période scientifique. Elle débute au congrès mondial de Sophrologie : « Nous pensions, disait Caycedo, qu’après dix ans de pratique clinique, l’Ecole de sophrologie pourrait commencer à produire les fruits vraiment scientifiques auxquels nous aspirons tous. » La brillante réussite du congrès mondial, la richesse et la haute qualité des communications ont très lar­ gement confirmé ces prévisions.

En octobre 1971, Caycedo fonde la première Ecole supérieure de Sophrologie dont les programmes fixent les bases scientifi­ques déterminant l’orientation de cette science. Ensuite com­mence la fondation des centres médicaux spécialisés dont l’im­portance est fondamentale pour son expansion.